Je ne suis pas tellement fervent de traditions à respecter
scrupuleusement, mais celle-ci, de faire un court bilan des musiques que j’ai
chéries toute l’année durant, persiste depuis longtemps. Alors, en ce 12
décembre de tempête, je m’y mets. Bien sûr, ces choix sont motivés, ou plutôt
orientés, en fonction des émissions de radio que j’anime au 89,1, www.ckrl.qc.ca , Folk d’Amérique et Midi Jazz
(les mardis) ainsi que la chronique de musique classique que j’y tiens le
vendredi matin. Je ne sais pas pourquoi,
mais c’est comme ça, cette année, mon catalogue aura l’air d’une pub de
Nonesuch…
Folk
Commençons par un trio d’albums, tous publiés sous étiquette
Nonesuch, que j’ai aimé passionnément et fait entendre en ondes régulièrement.
Le premier, Freedom
Highway, est l’œuvre de la remarquable Rhiannon Giddens .
D’une voix puissante et envoûtante, la chanteuse rappelle le passé esclavagiste
de l’Amérique et la lutte de libération qui se poursuit depuis. Chansons
originales et reprises de vieilles mélodies (Freedom Highway, par exemple, est
un hymne écrit en 1965 au cœur de la lutte pour les droits civiques),
accompagnées d’instruments habituels du folk américain (Giddens est une
virtuose du banjo sans frettes) composent cette galette éloquente,
bouleversante et essentielle.
Diplômée (en opéra!!) du prestigieux conservatoire
d’Oberlin, en Ohio, la chanteuse a débuté sa carrière avec les Carolina
Chocolate Drops. Remarquée par le producteur T-Bone Burnett, son talent sera
particulièrement remarqué lors du concert donné la suite de la sortie du film Inside LLwein Davis, des frères Cohen.
Freedom Highway est en lice pour un Grammy.
À écouter : Birmingham Sunday
Offa
Rex est né de la réunion de la chanteuse écossaise Olivia Chaney et du
groupe néo-trad The Decembrist, tous membres de l’écurie Nonesuch. La parution de l’album The
Queens of Heart a rapidement séduit tant les grands médias que la
presse spécialisée. Mélange de chansons des traditions anglaise, écossaise et
irlandaise, revisitées par les sonorités modernes des Decembrists et magnifiées
par la voix chaleureuse et riche d’Olivia Chaney, le disque est un pur joyau
folk.
À écouter : The Old Churchyard
Autre joyau, autre splendeur, la réunion du célèbre Kronos
Quartet avec les deux chanteuses précitées, Rhiannon Giddens et Olivia Chaney,
auxquelles s’ajoutent celles, non moins remarquables, de Natalie Merchant
et Sam Amidon. Le titre de l’album, on
vous le donne ne mille : Folk
Songs, question qu’il n’y ait aucune ambigüité. Même magie!!! Une
vraie trilogie!!!
À écouter : The
Butcher’s Boy
Ah, j’allais oublier Colter!! Colter Wall, ce jeune chanteur
country-folk de la Saskachewan à la voix grave, écho de celles de Johnny Cash
ou Greg Brown. Grand fan de Townes Van Zandt dont on retrouve des reprises sur
You Tube, le jeune Mur vient de faire paraître un premier album éponyme.
Guitare et voix, c’est tout. Et il n’en faut pas plus pour faire de ce disque entièrement
constitué de ballades, une réussite. Colter raconte la vie dans les Plaines (et
non, ce n’est pas plate!), y associant moult personnage fascinants. Merci à Alain Larose pour
l’avoir (solidement) accroché à mon oreille.
Disque à compte d'auteur (facilement disponible sur plusieurs plateformes.)
Classique
Je déteste ce mot qu’on associe, bien à tort, à un élitisme
snob en musique. C’est vrai qu’il y a de drôles de cocos qui se pointent à des
concerts dans le but de paraître, mais je ne vous apprendrai rien en vous
disant que ce n’est plus là qu’on retrouve les vrais snobs… Reste la musique,
une musique de tous les temps, riche et souvent savantissime, qui nous raconte
plus de 1000 ans de d’histoire occidentale (en ce qui me concerne) sous de
multiples formes, du compositeur ou musicien seul en scène aux gigantesques
orchestres et chœurs des 19e et 20e siècles.
Bref, deux albums ont retenu mon attention, plus
particulièrement, cette année. D’abord, celui du quatuor formé de l’intense
violoniste néerlandaise Janine Jansen, du jeune et brillant pianiste français
Lucas Debargue, du violoncelliste Torleif Thedéen et surtout l’époustouflant et
inspiré clarinettiste Martin Fröst. Ensemble, ils ont enregistré le Quatuor pour
la fin du temps d’Olivier Messiaen, œuvre composée dans un camp de
prisonnier de guerre allemand en 1940, le Stalag VIII-A à Gorlitz, où le
compositeur et quelques amis musiciens étaient détenus. L’œuvre, un avant-goût
musical de l’Apocalypse biblique, est hautement inspirée et complexe, exigeant
toute la concentration possible tant des exécutants que de l’auditoire.
Nous avons eu droit, en novembre, à une exécution publique
de cet œuvre par ces musiciens, dans le cadre de la saison 2017 du Club musical
de Québec. Ce fut un concert étonnant, peut-être encore plus frappant en direct
que sur disque et la perfection était au rendez-vous; tant pour la performance
des musiciens que pour l’attention du public.
À écouter : Présentation
Franz Schubert compte parmi mes compositeurs de prédilection.
Son lyrisme, sa poésie, son humanisme, sa puissance créatrice me touchent
personnellement. Je m’y reconnais. Ses cycles de lieder, particulièrement son
Voyage d’hiver, le célèbre Winterreise, font le bonheur de plusieurs de mes
soirées, comme celle qui s’annonce, dans la tempête. Ses œuvres pour piano, notamment
les trois dernières sonates composées, durant sa 31 années, à quelques semaines
de sa mort, sont des œuvres particulièrement fortes et expressives; œuvre que le
compositeur n’aura jamais entendu. Aujourd’hui, les plus grands pianistes ont
enregistré ces œuvres et plusieurs avec brio. C’est le cas de Krystian Zimerman
qui, à 60 ans, propose sa vision torturée de ces œuvres que certains voient
plus sereines. À ce sujet, le texte
du critique du quotidien Le Devoir, le vénérable Christophe Huss, est
éclairant. Cette version, celle de Zimerman, me rejoint totalement.
Disque Deutsche Grammophon
À suivre…
Aucun commentaire:
Publier un commentaire