lundi 11 juin 2007

L’érotique de l’eau





Ça a commencé vendredi soir, durant le souper, au moment où ma Loulou et moi planifiions notre fin de semaine nautique. Le soleil, encore haut dans le ciel, inondait la galerie où nous étions assis à prendre le p’tit rosé de l’apéro et à écouter la rivière nous rafraîchir de son glougloutement régulier. Puis, en placotant, en se disant qu’on irait le lendemain au lac Lagon, chez nos amis Janine et Bertrand (à Tewkesbury) pour pratiquer gîtes et récupérations, je massais doucement la plante des pieds de ma douce qui, par les soupirs qu’elle laissait échapper à son insu, semblait apprécier au plus haut point.   

Déjà, les kayaks étaient sur le toit de l’auto, mais il restait beaucoup à faire en soirée pour être prêts tôt le matin. Alors, on s’est mis à la préparation de notre week-end et on s’est couché de bonne heure. J’ai passé la nuit à faire des rêves maritimes en compagnie de ma blonde, à revivre des moments bénis en kayak de mer, à sentir le balancement régulier du fleuve sous un vent léger et chaud qui nous enivre littéralement pour peu qu’on ferme les yeux et qu’on se laisse porter. Dans mon rêve, on passait une heure ainsi, côte à côte dans nos bateaux, à être ballottés par la mer, entourés d’oiseaux de mer mers, de phoques et de baleines. Le Nirvana.

Je me suis réveillé alors qu’un rayon de soleil s’était frayé un chemin entre le rideau et le bord de la fenêtre de notre chambre pour venir caresser l’épaule dorée de ma douce au bois dormante. Vous dire l’émotion qui m’a envahit… Jaloux du soleil, j’ai déposé la main avec une infinie précaution sur l’épaule de mon amour qui, comme par magie, a ouvert les yeux en me souriant. Je ne vais pas vous faire de dessin pour la suite des choses, mais vous comprendrez facilement que nous n’avions pas fini de tanguer…

À l’eau…

C’est donc le cœur léger que nous sommes arrivés chez nos amis qui, pour ajouter le plaisir à l’agréable, nous avaient invités à bouffer des homards en fin de journée. Nous serions une dizaine de personnes autour d’une table dressée dans un solarium donnant sur le lac miroir et sa montagne verte et son ciel bleu et notre amie Lucie venait de Montréal.

Elle est arrivée juste avant que Loulou et moi mettions nos embarcations à l’eau. Ah, le plaisir partagé des rencontres d’amis dans un lieu chaleureux! Pendant que nous nous amusions à nous virer à l’envers, à essayer d’esquimauter et de nous récupérer, l’ami Bertrand nous filmait. En fait, il ne filmait que nos échecs. « Salaud! » que je lui ai crié. Et c’est là qu’il m’a répondu qu’on était filmé et que tout ce que je disais était enregistré. Mais j’avais dit ce que j’avais à dire…

Puis, ma douce et moi avons fait quelques fois le tour du lac pour profiter pleinement du soleil vif et de sa chaleur. Il faut croire que l’aube m’inspirait encore, parce que de voir le derrière du bateau de ma blonde osciller sous ses coups de hanches a provoqué chez moi un trouble qui eut pu être gênant si l’hiloire de mon kayak n’avait pas été recouvert d’une jupette, qui normalement, sert à empêcher l’eau de pénétrer… 

…et au vin!

Puis l’organisation du souper. Personnellement, j’éprouve autant de plaisir à préparer les plats, monter la table, organiser les choses qu’à bouffer, surtout quand ça se fait entre amis. Ça jase, ça rit beaucoup, ça discute et dispute sur fond de musique country, de chanson française, de ballades de jazz bien appuyées. On se croirait dans un film français, comme à ce souper avec Ravel dans Un cœur en hiver (avec la belle Emmanuelle… Béart!) de Claude Sautet. Nos amis étaient en verve, chaleureux, généreux comme d’habitude. Des amis merveilleux, comme le sont les vrais amis!

Comme le dit Julos Beaucarne :
Les vrais amis sont comme les arbres
Ils tendent leurs bras, ne plient pas
Ils grimpent vers la lumière
C'est ce qui les met en joie

Les vrais amis sont comme les arbres
L'univers est dans leur peau
Qu'il fasse pluie, glace ou bourrasque
Ils parfument et tiennent chaud

Un petit verre de rosé en travaillant, un autre en apéro quand le reste des invités arrive, et un autre ou deux encore avec les tapas. J’aurais dû me méfier de moi-même, surtout après que Bertrand eut lancé : « quand il n’y en aura plus, il y en aura encore! » Il y en a eu, en effet, beaucoup et j’en ai beaucoup trop pris, de sorte qu’au milieu de la soirée, je suis disparu sous la tente qu’au moins, j’avais eu la prévoyance d’installer en arrivant… Paraît que lorsqu’on s’est rendu compte de mon absence, certains ont tout fait pour me tirer du coma. Rien à faire. Même le chant tonitruant des grenouilles n’a pu me ramener à la vie…. avant 4 heures du matin, aux premières lueurs de l’aurore.

Mais à partir de ce moment et jusqu’au lever du soleil, il m’aurait été impossible de me rendormir tant la puissance sonore des batraciens est assourdissante. En vieil habitué du camping sauvage, j’avais cependant pris la précaution d’apporter des bouchons d’oreilles. Malgré tout, je me suis levé avec le soleil, vers 5h. Encore étourdi, vaguement nauséeux, je n’ai cependant pu résister au miroir qu’offrait le lac. J’ai mis mon bateau à l’eau et je me suis laissé porté.
Quelques minutes plus tard, ma douce sort de la tente en costume d’Ève et entre, comme la princesse d’un conte de fée, dans l’eau calme. Le sourire aux lèvres, elle se laisse porter par l’onde. Moi, encore une fois je suis transporté!

Ça dégrise, je vous jure… Et dire qu’il restait encore toute la journée et une longue soirée à vivre auprès de cette sirène. Une soirée qui devait s’avérer, encore une fois, magique!




Gilles Chaumel
Le lundi 11 juin 2007