mercredi 26 mai 2010

Le temps réel

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Loulou et moi avons passé la longue fin de semaine des Patriotes sur les bords du fleuve, à la Sebka (Société écologique des battures de Kamouraska), tout près du village de Kamouraska. Là où le temps prend le temps d’être ce qu’il est, du temps. Du temps réel en fait, le temps qu’il faut à la marée pour envahir la batture et se retirer; le temps que le soleil prend à se lever, à traverser le ciel d’est en ouest et de nous offrir les plus étincelants couchers imaginables; le temps de mettre le kayak à l’eau au quai du village, de partir, sous le roulis important des vagues, au-delà des îles, au large, à la rencontre des petits pingouins, des guillemots à miroir, des eiders et même, oh surprise, des oies blanches; le temps de regarder ma douce, de jaser sans craindre d’être interrompu par le téléphone ou par quelque source d’urgence que ce soit qui vient bousculer le déroulement du temps.

Où je veux en venir? Mais à l’autre temps, celui de CNN, de RDI et de tous ces médias qui font défiler les événements à toute vitesse, si rapidement que vous n’avez même pas eu le temps d’aller chier que vous avez raté des événements cruciaux pur l’avenir de la planète. Comme si la vie se déroulait au rythme des médias et nous enchaînait pareillement. Il en est de même, de ce temps des fausses urgences qu’on vous impose au travail et qu’à votre tour vous devez imposer à vos collègues et à vos fournisseurs. C’est urgent, faut ce que soit fait pour 16 h… et il est 11h58, évidemment. Et cela, le plus souvent pour rien. Finalement, l’urgence est reportée sine die. Une autre, cependant, pointe déjà à l’horizon…

Où je veux en venir? À la libération du temps. À ce que nous avons ressentis, ma douce et moi, durant ces quatre jours. L’impression d’émerger d’un long couloir de temps passé trop vite à s’occuper des fausses urgences et à suivre le rythme trépidant que nous dicte martialement l’actualité. Ouf, tellement bon de retrouver notre amour intact comme si on n’avait pas eu le temps de s’en occuper depuis plus d’un an. Remarquez, que de l’amour, on en a eu à plein, ne serait-ce que celui, inconditionnels, de nos petits-fils, sans compter la sollicitude occasionnelle de nos enfants et celle, éternelle, de nos amis. Mais là, de revenir à la source de notre bonheur, au fondement de notre existence, de notre vie commune, wow!

Paul Auster et l’identité

Il y a toujours un peu d’angoisse qui plane dans les romans du remarquable écrivain Paul Auster. C’est qu’il pose sans cesse la question de l’identité. Qui sommes–nous, chacun de nous? Sommes-nous celui que nous pensons être? Qui pensons-nous être? Je viens de relire, dix-huit ans plus tard, la remarquable Trilogie new-yorkaise. À la page 339, de l’édition de poche (Babel, Actes Sud), on peut lire ceci :

« Pendant plusieurs semaines, j’ai tourné et tourné en esprit, cherchant un début. Je me répétais que toute vie est inexplicable. (…) Nous existons pour nous-mêmes, peut-être, et il y a des moments où nous parvient une lueur de celui que nous sommes, mais en fin de compte nous ne pouvons avoir de certitude, et au fur et à mesure que nos vies se poursuivent nous devenons de plus en plus opaques à nos propres yeux, de plus en plus conscients de notre propre incohérence. Nul ne sépare la frontière qui le sépare d’autrui – et cela simplement parce que nul ne peut avoir accès à lui-même. »

C’est pourquoi, les « Kamouraskas » sont si importants me semble-t-il…

La rando

Juste pour vous rendre jaloux de mon coin de pays, quelques photos du sentier du Hibou, à Stoneham orné de ma très chère amie, la belle Peggie…

Le rêve du Diable

C’est le titre de la nouvelle émission de radio que j’animerai cet été, en compagnie de mon bon ami Christian Girard, libraire chez Pantoute et surtout un merveilleux exégète des musiques d’Amérique du Nord. Ça tombe bien, parce qu’il va y être question, de « North American Folk Songs » de bout en bout. Nous prenons pour postulat le renouveau de la Folk Song est un phénomène datant de l’époque de la constatation (on a beaucoup parlé à l’époque de protest songs) et mettant en vedette les Bob Dylan et Joan Baez qui attiraient des dizaines de milliers de personnes. De ce centre de création nous remontrons en aval jusqu’aux fondements celtiques des musiques traditionnelles qui se sont développés en Amériques jusqu’aux créateurs d’aujourd’hui : les Bill Morrissey, Steve Earle, Greg Brown, Lucinda Williams, Richard Séguin et autres Florent Vollant. On ne passera pas à côté du blues et des formes hybrides comme le Blue Grass, voire le gospel.

Au fond, que ces chansons aient des prétentions universelles (The Times hey Are A Changin’, professait l’unique Robert Zimmerman, mieux connu sous le nom de Bob Dylan) où très locales, voire intimes, elles ont une résonnance universelle que nous voulons partager avec nos auditeurs et auditrices. Il n’est pas question ici d’anthropologie musicale mais avant tout de proposer les chansons qui nous émeuvent le plus.

Le rêve du diable est diffusé à compter du 31 mai 2010, le lundi soir, de 21 h à 22 h 30 sur les ondes de CKRL-MF, la radio culturelle de Québec, au 89,1 de la bande MF. Qu’on se le dise!

Le rêve du diable est le titre d’un roman du musicologue et écrivain Lee Smith (à ne pas confondre avec l’ancien as lanceur des Cubs de Chicago) qui

Musique

Via Crucis d’abord. La musique baroque italienne savante et populaire sous la direction de ce curieux personnage qu’est la harpiste allemande Christina Pluhar, avec des chanteurs corses envoûtants, un haute-contre, une soprano merveilleux, des musiques sensuelles où dominent, outre la voix, la cornet à bouquin et le violon. Cette dame, et son ensemble qui s’appelle L’Arpeggiata, ont une façon unique de redonner vie à des musiques anciennes et faire de chaque œuvre, chaque pièce, de moments de bonheur éternels. Écoutez Maria, ce traditionnel corse qui vous remue les tripes comme c’est pas permis, écoutez le célèbre Stabat Mater de Gian Felice Sances arrangé pour soprano (Nuria Rial), alto Philippe Jarrousky) et cornet à bouquin (instrument à vent originellement fait d’une corne de bouc) ou encore le Volgio Morire de Luigi Rossi, lente déclamation au violon. Sûr que vous n’en reviendrez pas.

Comme il en sera question tout l’été, voici quelques titres à retenir dans le genre folk et blue grass en commençant l’étonnant Carolina Chocolate Drops, trois musiciens noirs qui font dans un répertoire habituellement associés à des blancs, du blue grass pur et dur avec des traditionnels et aussi quelques modernités drôlement virés. On y entend violon, banjo, guitare, harpe sous de Justin Robin, Rhiannon Giddens (c’est une fille…) et Dom Flemons accompagnés de quelques invités. Faut écouter la version trad qu’ils donnent de Trampled Rose, tiré de l’album Real Gone de Tom Waits! Jouissif…

Greg Brown pour terminer. Un concert donné en 2004 pour souligner 25 ans de carrière (?), intitulé In The Hills of California donné en compagnie de plusieurs artistes dont la chanteuses Shawn Colvin et Karen Savoca et surtout une guitariste toute en émotion qui s’appelle Nina Gerber. Deux disques des plus belles chansons de ce mythique folksinger de l’Iowa. Faut absolument entendre Poet Game, Think About You et les reprises magnifiées de Kind Hearted Woman (Robert Johnson) et surout de Don’t Let Me Down (The Beatles). Tout l'art de cet immense musicien sur deux disques pour le prix d’un seul. Tout cela, chez mes amis de Sillons le disquaire évidemment.

lundi 3 mai 2010

Bonheur de bonne heure!



J’écris en écoutant Herbie Hancock au piano. Seul. Les notes de My Funny Valentine s'égrenent, pleines de délicatesses et de subtilité, presque amoureuses. Encore plus que du temps de Miles, celui du début des années 1960, où Herbie, Ron, Wayne et Tony accompagnaient l’énigmatique trompettiste. Puis, pendant un moment, les notes fraient avec l’abstraction avant de revenir à la tendresse. Impressionnant et même émouvant. Une très, très belle version de cette chanson tellement rabâchée. Un disque de 1980 qui survient après la période funky-fusion des Headhunters et avant le Rockit hip-hop électro machin. Du piano dans sa plus grande pureté sur une grand Steinway and Sons. Ça s’appelle justement comme ça, The Piano (disque Columbia), une musique de nuit ou d’aurore et d’aube, de petit matin au bord du fleuve, mer étal d’avant la levée du vent.

La sérénité faite fleuve, photo : Mario Groleau

C’était exactement cela, dimanche dernier, quand ma Loulou et moi sommes allés à Batiscan pour faire du kayak de mer. Pourquoi Batiscan? Parce que le village est beau, accueillant dans sa vieillesse (1684), les gens sympathiques, parce qu’on y a installé une infrastructure d’accueil pour les pagayeurs, et parce que la marée s’y fait très peu sentir. Alors, ma douce et moi avons traversé le fleuve jusqu’à Saint-Pierre-les-Béquets, y avons fait une pause restauration sur la plage pour admirer les oies blanches qui ne cessaient de nous survoler.

Puis on est repartis, au milieu des bernaches et des oies qui n’attendaient pas notre arrivée pour s’envoler. Pourtant, nous n’aurions voulu pour rien au monde déranger ce troupeau de milliers d’oies blanches qui paressait à la jonction du fleuve et de la rivière Batiscan. Nous passions à quelque six ou 700 mètres de distance quand les premières se sont envolées, suivies de toutes les autres par vols successifs. Un nuage blanc piaillant puissamment et harmonieusement, se déplaçant à ras d’eau, un nuage mouvant, moirant sous la lumière du soleil, virevoltant et, finalement, se posant quelques centaines de mètres plus loin. Tout à coup, c’est comme si rien ne s’était passé et, à part quelques caquètements épars, le silence est revenu, uniquement troublé, à intervalle régulier, par l’engeance des motos qui pullulent et polluent l’air de leur pétarades inutiles et agressantes. Faut croire qu’on ne peut tout avoir; le beurre et l’argent du beurre comme dirait ma blonde.

Ma blonde, ma Loulou, faut la voir pagayer avec aisance et bonheur, reine trônant sur son fleuve et ses eaux, souriante au ciel bleu et à la nature vibrante qui nous entoure. Le bonheur flottant…

Le vrai printemps

Les bourgeons et la rivière, chez nous.

Ça commence à verdure vrai, dans les hauts de Stoneham. Depuis hier, la pluie qui a succédé à plusieurs jours de soleil, a fait s’éclater les bourgeons et pousser le gazon en une sorte de frénésie. Au moment où j’écris ces lignes, la pluie qui tombait encore il y a cinq minutes, fait place au soleil. La rivière La Loutre, qui décore notre cour, gronde plus fort, enflée par l’eau de pluie, les juncos jonchent le sol picorant les graines, se faisant les provisions nécessaires qui leur permettra de voler jusqu’au Grand Nord. Ils sont accompagnés par les sitelles, mésanges, chardonnerets, quelques sizerins flammés à l’occasion. Depuis quelque temps déjà, ce sont les merles américains, aux chants si mélodieux, qui nous réveillent. Depuis peu, les bruants à gorge blanche les accompagnent. Ce serait le bonheur total s’ils daignaient attendre 6 h 30 avant de commencer à s’égosiller au lieu de… 4h45!

Florent a eu deux ans

Florent, mon délicat mais très décidé petit-fils, le cadet de Rosemarie et Christian, a fêté ses deux ans le vendredi 30 avril. Il a fait ça sérieusement, je crois, entre amis, Jack, entre autres, et avec ses frères. Il est toujours sérieux Flo, quand il est en vedette, comme gêné qu’on lui porte toute l’attention.

Florent a eu un Biniou en cadeau. C'est sérieux, ça!

Pourtant, c’est un rigolard de première, toujours à faire le clown pour se rendre intéressant. Son dernier fait d’armes dans le genre, s’étouffer d’un fou rire inextinguible en prenant son bain avec ses frères. Il a tant ri que les deux autres ont quasiment eu peur… quand il a perdu le souffle... Brave Flo, je te serre fort!

L'image de la tendresse, Loulou et le petit Loïk...