jeudi 17 octobre 2019

Gardiner – Bach, le livre





John Eliot Gardiner est un chef d’orchestre d’importance. D’abord spécialisé dans les musiques des 17e et 18e siècles, il a rapidement élargi ses cadres jusqu’au musiques les plus récentes. D’abord fasciné par Monteverdi, il a été rapidement subjugué par Jean-Sébastien Bach. Surtout, tout jeune, il s’est intéressé à l’art d’interpréter les musiques anciennes. Historien autant que musicien de formation, il a fait paraître, en 2013, Music in the Castel of Heaven, A Portrait of Johann Sebastien Bach, traduit (magnifiquement) en 2014 chez Flammarion et réédité en 2019.

Son œuvre majeure, un projet démesuré, demeure l’enregistrement live dans différentes églises d’Europe d’Amérique de l’intégrale des quelques 200 cantates religieuse de Bach en l’an 2000 pour souligner le 250e anniversaire de la mort du compositeur.   

La question que pose ce livre : comment une musique aussi complexe a-t-elle pu être écrite par quelqu’un en apparence si banal, dont on sait peu de chose du quotidien, de la personnalité. Quelqu’un dont la scolarisation était pour le moins déficiente. P. 86

Et son objectif : rencontrer l’homme en sa création, selon le mot de cet autre musicologue chevronné qu’est Gilles Cantagrel (une des estimés reviseurs de la traduction française). Faut le dire d’entrée de jeu, aucune des nombreuses bios de J.-S. Bach n’a le souffle de celle-ci. Si l’auteur, comme historien, maîtrise à fond toutes les clés du genre, c’est le style qui l’emporte, offrant au lecteur un portrait saisissant de l’Allemagne, et plus particulièrement la Thuringe, à l’époque du célébrissime cantor. Tout y passe et dans le détail, régimes politiques et économiques, l’omniprésence (lire écrasante) de la religion sous les préceptes de Luther, l’éduction et la conception qui en dépendaient, les mentalités baroques, le clan Bach et en détail, la vie à Leipzig, dernier refuge musicien, sa façon d’écrire de corriger, ses relations tendues avec l’autorité, etc., pour finir avec les grandes œuvres et le perfectionnisme surhumain d’un homme dont l’image est pourtant celle du plus ordinaire des quidams. 

Gardiner, John Eliot. Musique au château du ciel, une portrait de Jean-Sébastien Bach. Flammarion, 2014, 2019, 746p.

Pour l’édition complète du cycle des cantates enregistrées en 2000