dimanche 19 avril 2009

Un dimanche sur le fleuve

Denis et Michel à bord de leur fringantes montures.
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Quel beau dimanche ce fut. Denis, l’ami disquaire était en congé en fin de semaine. On a donc discuté, à la fin de la semaine dernière, de notre première sortie de gars en kayak. « Je vais appeler Michel, pour voir si ça l’intéresse, me dit Denis qui, bien sûr, était partant. Michel, c’est Michel Lamoureux (quel beau nom quand même, j’en suis jaloux!). Lui, j'étais certain qu’il dirait oui. Les trois ou quatre fois que je l’ai vu cet hiver, en ski de fond au Refuge de Saint-Adolphe, on n’a pratiquement parlé que la prochaine saison de kayak de mer. Alors… Alors il a dit oui, évidemment.

Hier midi, donc, je me suis retrouvé chez lui à attendre Denis de retour de ses copains de Saint-Sylvestre où ses kayaks ont hiberné. Et on est partis, direction Neuville et sa marina. En arrivant, vers les 12 h45, le vent est pratiquement tombé et ça ne lui a pas fait de mal parce qu’il est tombé tout doucement. Le temps de mettre nos embarcations à l’eau, de revêtir nos « wet suit » et de quitter l’enceinte de la marina, il a rendu un dernier souffle, nous emmenant, avec la marée montante, tout droit de l’autre côté du fleuve, à Saint-Antoine-de-Tilly.

Les grandes oies
Sous un ciel bleu, vierge de nuages, l’effet berçant des vagues est magique qui crée un état de bien-être instantané et euphorisant. Les copains relaxent, admirant benoîtement le paysage qui s’offre à eux, cette Côte-du-Sud avec son flanc escarpé sur lequel se dresse le petit village. C’est d’ailleurs Denis qui, apercevant de loin le quai, nous avise qu’il s’agit vraiment de Saint-Antoine-de-Tilly et non Sainte-Croix-de-Lotbinière. il est venu l'an dernier à ce même endroit fêter une amie. Chanceux, le site est enchanteur!

Mais ce qui attire soudain notre attention, c’est un criaillement aigu comme un bruit de fond tenace en provenance du dit quai. Ce n’est qu’à ce moment qu’on voit s’envoler quelques milliers d’oies blanches dans un miroitement magnifique. J’avais bien vu, plus près de nous quelques dizaines bernaches, farouches mais c’est avec ravissement que nous avons regardé cette volée majestueuse.

Puis il a fallu revenir. Ce fut, me semble-t-il, un peu plus ardu qu’à l’aller, comme si la marée n’avait pas encore terminé sa montaison, comme si le vent, absent en apparence, nous opposait une tranquille résistance. Mais bon, il faisait toujours aussi beau et, pour s’assurer un itinéraire plus efficace, nous avons pointé le nez de nos nefs directement sur le clocher de l’église de Neuville. Comme l’a dit Denis : « Je suis contre la religion, mais j’aime bien les églises, surtout quand elles nous servent de point de repère. » Détendus et heureux, on s’est quitté à quai, nous promettant de revenir bientôt. Oui, un bien beau dimanche sur le fleuve, en toute amitié.

jeudi 16 avril 2009

Bleu printemps

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Il y a du trafic sur le fleuve ce matin. Quatre cargos sont en vue. Le premier, tout près des silos de la Bunge, est rejoint par le remorqueur qui amène le pilote qui le conduira jusqu’à Montréal et peut-être plus loin, dans les Grands Lacs. Il s’appelle le Ellen Fitzback et ressemble à un pétrolier léger, à cause de la nombreuse tuyauterie qui tapisse son pont.

Derrière, passant la pointe de l’Île d’Orléans, en route vers le large, un grand cargo porte conteneurs de la compagnie Maersk Line, un long bateau à la coque bleue pâle comme celui qui a été attaqué par les pirates somaliens dans le golfe persique en fin de semaine et qui s'appelle Maersk Alabama. Le Maersk de ce matin vient tout juste de croiser un pétrolier qui fait route vers Québec alors que tout au fond de la baie, juste en avant du pont, entre l’île et la côte de Beaupré, un cargo est ancré là depuis trois jours. Il est remarquable avec les quatre immenses tours comme autant de grues de chargement qui surmontent son pont.

Enfin, au port, deux autres navires sont à quai. L’Umiak 1, vraquier de la famille Desgagnés, est installé juste derrière les silos alors qu'en face le Kepti, est à remplir ses cales d'un quelconque minerais.

Tiens, arrivé de nulle part, de Trois-rivières peut-être, le Jade Star accoste tout à coup entre les deux pylônes de l’entrée du Bassin-Louise. Il s’agit, encore ici d’un cargo qui transporte des liquides…

Il est à peine 7 h 15 et le soleil est déjà haut au dessus des Appalaches. Le ciel d’un bleu tendre, pur, exempt de tout nuages illumine le fleuve presque étale, à peine veiné des courants nombreux qui le torturent en face de l’Île. Du haut de mon 27e étage du Delta, la vue est toujours aussi grandiose. Outre des collègues, c’est de cette vue dont je vais le plus m’ennuyer lorsque je serai à la retraite.

Pâques
On gelait le matin de Pâques. Contrairement à ce que la météo annonçait, il n’y avait ni pluie, ni neige, mais un ciel bleu vif et un fort vent s’engouffrait par la fenêtre entrouverte de notre chambre. On s’est réveillé au premier rayon de soleil qui a percé le rideau. Loulou m’a souri de son plus beau sourire ensommeillé, je le lui ai rendu illico.

Je me suis levé avec l’intention bien arrêtée de me recoucher aussitôt l’épisode pipi terminé. C’est ce que j’ai fait, comme ma douce d’ailleurs. Pour ajouter au bonheur du lit, on a mis l’Oratorio de Pâques de ce bon Jean-Sébastien dans le lecteur et on s’est laissé porter par le rythme festif de la trompette et des cordes. Puis, au son langoureux du hautbois joué sur un air d’une infinie tendresse, on s’est regardé, collé un loooong moment, amoureusement, lascivement, ardemment, mêlant nos ébats à l’allégresse du chœur. Pour tout dire, on a un peu oublié la musique…

Kayak
Lundi, autre journée pleine de soleil et de vent. Des pointes à 60 km heures qu’on annonçait. Un nordet typique, sec et piquant. Malgré tout, j’ai voulu mettre mon kayak à l’eau. Ma Loulou, qui n’avait pas vu ses petits-fils de la fin de semaine, penchait pour une sortie avec Gédéon, notre Dieu de moins en moins parfait, semble-t-il.

« Ok, ai-je dit. On va mettre à l’eau à Batiscan. Il n’y pas de marée à cette hauteur et, au cœur de ce village magnifique, il y a une superbe plage de sable. Gédéon pourra y jouer. » « Pourquoi pas? », me fut-il répondu.


Ce fut bel et bien. Mais pour la sortie de kayak, j’ai déjà fait pas mal plus tripant. Sur le fleuve, un vent du nord frappe toujours le côté du kayak, tendant sans cesse à ramener la proue vers la rive. À chaque coup de pagaie, il faut compenser cette attraction terrestre. C’est comme si on devait toujours pagayer d’une seule main. Alors, on doit longer les rives le plus près possible, pour éviter l’effet du vent. Un peu ennuyeux, faut avouer. Heureusement, il y avait les baies inondées, plantées d’arbres à travers lesquels on pouvait circuler et débusquer les centaines de canards qui y trouvent refuge ces temps-ci. En fait, farouches, ils se débusquaient tout seuls. Pas très écolo, comme sortie, de déranger les canards à tout moment. Misère.

Heureusement, le petit Gédéon était de bonne humeur. On s'est arrêté un long moment au quai de Portneuf pour admirer les centaines d'oies qui longeaient la berge, naviguaient toutes en tas sur l'eau et volaient en formation. Il était fasciné, le Ged. On l’a ramené à la maison pour le souper et la nuit. On a joué aux autos et au garage. Loulou lui a donné son bain et raconté des histoires avant le dodo. Le lendemain matin, comme souvent, il ne voulait pas retourner chez lui, râlant, refusant de remettre ses bottes, de s’habiller. La preuve que Dieu n'est pas parfait. Fallait s'y attendre.

Musique
J’aime beaucoup Florent Vollant et sa folk innue intime, un peu magique, chantée dans cette langue rare et belle qui celle des Montagnais de la Côte-Nord. Son troisième album solo, Eku Mamu, toujours aussi tendre et bienveillant, nous emporte encore une fois au cœur de cette Amérique musicale inspirée de la country et des rythmes traditionnels. S’y ajoute le superbe Mother She Knows du bluesman Wendat et guitariste Gilles Sioui et une vieille toune western écrite par Yvon Durand, popularisée par Julie Daraîche et qui s’appelle Que la lune est belle ce soir. Cet été, nous avons l’intention, ma Loulou et moi, de retourner sur la Côte-Nord. Eku Mamu nous accompagnera de longues heures.

Oh, en passant, Marie-Christine Blais, journaliste de La Presse, en fait un beau portrait dans l’édition de fin de semaine.

mardi 7 avril 2009

L’Étoile du Nord rides again…

L’Étoile du Nord est unique, c’est ma Loulou. La très grande majorité des lecteurs de cette chronique le sait, mais ce n’est pas une raison pour ne pas le répéter. Surtout que mon admirable amour a accompli un exploit peu banal il y quelques jours. Dans la même semaine, elle est allée donner une conférence sur le tourisme nordique à Lourdes-de-Banc-Sablon et a assisté à la soirée de gala des grands prix du tourisme de la Baie-James, à Matagami. Le Québec d’Ouest en Est.

Qu’est-ce qu'il y a là de particulièrement remarquable? Pour ces deux voyages, ma Loulou s’est payé rien de moins que... 16 décollages et atterrissages pour les huit escales obligés de ses voyages! Résultat, une belle grippe qui s’est transformée en bronchite. Bon, elle se soigne soigneusement, c’est toujours ça.
Plan
Si elle voyage aux quatre coins du Nord, chez les Inuits, les Cris et les Jamésiens, c’est qu’elle agente de développement touristique pour ces grandes étendues auxquelles elle a consacré une longue partie de sa vie… avec une passion infinie. Son dernier fait d’armes, la rédaction Plan Nord gouvernemental en matière de tourisme intitulé « Le tourisme au Nord du 49e parallèle » qu’elle est en voie de compléter. Basée sur les principes du développement durable et la mise en valeur des ressources humaines et naturelles locale, son « œuvre » a été accueillie avec enthousiasme à toutes les étapes d’approbation qu’elle subit depuis quelques mois.

En attendant le résultat final, le printemps arrive à petits pas et, après le ski de fond, ma douce s’est mise à la course à pied… pour pouvoir continuer de s’entrainer même dans ses voyages nordiques. Elle s’est aussi acheté un vélo, un superbe « Oslo » de Da Vinci construit à Saguenay et, la fin de semaine de Pâques, nous allons chercher nos kayaks de mer chez nos amies Peggie et Marguerite.

Un souper gastronomique
Comme il est question de ces dames, il vous savoir qu’elles et nous avons décidé d’un accord des plus communs, d’échanger, chaque mois, des repas gastronomiques. On a tiré à pile ou face, en vain parce qu’elles avaient déjà décidé d’être les premières. C’est samedi soir qu’elles ont commencé les hospitalités et, franchement, la barre sera haute le mois prochain.

Au menu, elles avaient concocté :

• Salade de verdure au crabe frais de Tadoussac, aux pétoncles et à la mangue;

• Potage de maïs au boudin et lardons grillés (slurp!);

• Trou normand à la vodka et feuilles de roquettes;

• Filet mignon aux champignons et betteraves étagées de fromage de chèvre chaud, comme repas principal;

• Coquille de chocolat noir et sa mousse de chocolat aux fruits comme dessert.

Bien sûr, les vins étaient à l’avenant, méticuleusement choisis. D’abord, pour l’entrée, un blanc, un Château Calabre Montravel 2007 merveilleusement fruité. Un rouge tendre a suivi, un Lo Sang del Païls Marcillac 2007, assez occitan si je me fie au nom et qui accompagnait drôlement bien l’étonnant potage. Puis nous avons eu droit à ce toujours succulent cabernet sauvignon Yulupa de la maison californienne Kenwood, pour le repas principal. Enfin, nous avions apporté un cidre de glace (malheureusement éventé) pour le dessert. Heureusement, la grappa de Peggie est venue clore en bonté ce festin.
Taille de police

Trek dans le "parque nacional tierra del fuego", près d'Ushuaia

Comme nos amies ont fait un long trek argentino-chilien au cours de 2007, nous avons eu droit, en milieu et fin de repas, à un diaporama de quelques-unes des plus belles photos d’Amérique du Sud imaginables. En vedette, des montagnes fabuleuses (dont le célébrissime pic de l’Aconcagua), des plaines à pertes de vue, une faune étonnamment exotique : des baleines franches qui sautaient au ciel à deux pouces de la caméra, des lièvres gros comme des chiens, des tatous craquant sous leur carapace anthracite, des condors grands comme des Cessnas 152, des lions de mer et… des Argentins. Bref, mille et une merveilles montrées et racontées par nos deux passionnées de la vie.


Trek torres del paine

Trek dans El Chalten - Fitz Roy

Les photos sont, bien sûr, l'oeuvre de Marguerite Laramée et de Peggie Lamarche. Les meilleures seraient de Peggie... à ce qu'elle dit. Nous les avons quitté, avec grands regrets, vers 1 h 45. Je faisais la radio le lendemain matin à 8h…

Les cordes de l’OSQ
C’était le 28e radiothon de ckrl-mf, cette fin de semaine. J’ai fait ma part en animant une heure classique, dimanche matin en compagnie d’Hélène Barbeau, chef des communications de l’Orchestre symphonique de Québec et d’un quatuor à cordes formés de musiciens de l’orchestre. J’ai même commis une courte entrevue téléphonique avec M. Classique, Edgar Fruitier, que je n’ai pas retenu trop longtemps pour cause de bronchite. Il a quand même eu le temps de nous raconter qu’il était tombé dans la musique quand il était petit, comme Obélix dans la potion magique… On s'en serait douté.

Quelle belle heure ce fut. Bien trop courte. Dame Barbeau adore son métier et son orchestre. Elle en parle avec un plaisir contagieux. Les quatre prestations offertes par le quatuor (du Mozart et du Beethoven) étaient éclatantes de vie et de bonne humeur. Comme nous étions, la dame des communications et moi dans le même studio 10’ X 15’ que les musiciens, on avait littéralement les oreilles dans les instruments. Jamais de ma vie je n’aurai été aussi près de la musique. Assis entre les deux violonistes, l’altiste et la violoncelliste, je pouvais entendre la sonorité tantôt râpeuse tantôt soyeuse des cordes, saisir toute la subtilité des échanges et de la polyphonie qu’elles engendraient. Surtout, j’ai pu voir tout le plaisir que ces musiciens avaient à jouer ensemble. Les collègues de la régie, metteur en ondes, sonorisateur, réalisateur affichaient eux aussi un sourire qui ne mentait pas. On a eu droit à un autre grand moment que nous réserve, immanquablement, chaque radiothon ckrlien.

Les cordes de Viktoria
Les six sonates et les partitas pour le violon seul de Jean-Sébastien Bach (Sei solo a violino senza basso accompagnato, comme il a intitulé son manuscrit) constituent le parangon sur s’est édifié tout l’art du violon occidental depuis le 18e siècle. Presque tous les grands violonistes s’y sont confrontés un jour ou l’autre et les nombreux enregistrements réussis offrent un choix innombrable choix au mélomane.

Il s’agit d’une musique qui explore toutes les possibilités de l’instrument à travers des mouvements de sonates et de danses stylisés (les partitas) dans le plus pur style baroque où se multiplient fugues et contrepoints. Dire que l’oeuvre est exigeante est un euphémisme. Elle demande aussi une habitude d’écoute, une concentration de chaque instant. C’est tout le contraire d’une musique de fond et il est proposé au néophyte d’en écouter une sonate ou une partita à la fois, puis de l’écouter encore et encore, histoire de l’apprivoiser avant de passer à une autre.

On n’est pas long à y revenir et à en redemander. L’exploration devient passion. Personnellement, elles m’accompagne depuis une trentaine d’années. Mais il n’est jamais trop tard pour commencer. Pour vous y mettre, je vous propose l’enregistrement tout neuf de Viktoria Mullova, la grande violoniste russe qui joue d'un instrument du luthier vénitien Giovanni Battista Guadagnini, un violon de 1750 monté, comme à l’époque baroque, d’un manche plus court et de cordes en boyaux de mouton. L'archet baroque qu'elle utilise est aussi différent, concave au lieu de convexe comme aujourd'hui. La dame y fait merveille. Un disque Onyx.

Bonne semaine!