Ma grande amie Claire (Minguy), m’a fait un inspirant cadeau
à l’occasion de mon anniversaire, une petit livre de Philippe Delerm intitulé
« Les mots que j’aime ». Il y en a ainsi plus d’une centaine auxquels
il donne, non pas une définition, mais une description de ce que chaque mot lui
suggère, sens, émotion, objet. Euh, enfin, quelque chose comme ça. Quelle bonne
idée à développer dans les Chroniques du lundi! Commençons par… violoncelle.
Son opulent, rond, pas tout à fait grave, mais assez quand même, velouté et, surtout
chantant, tel m’apparaît le violoncelle. En fait, rien ne me semble plus beau
que la longue phrase du violoncelle, avec son vibrato intense et long.
Tellement de belles voix du 20ième siècle semblent calquées sur sa
sonorité envoûtante : Ella Fitzgerald, Frank Sinatra, Jacques Bertin par exemple.
Et que dire de sa forme! Toute en courbes et en rondeurs opulentes des plus sensuelles, douces au toucher… Une sensualité exacerbée par ses teintes allant du brun pâle au brun rouge ocre le plus enivrant. Le violoncelle, c'est l'instrument que l'on remarque d'abord dans un quatuor à cordes. Et quand il est tenu par une Emmanuelle Bertrand, une Ophélie Gaillard ou une Tatiana Vassilieva, alors là, on est en droit d'être troublé.
Et que dire de sa forme! Toute en courbes et en rondeurs opulentes des plus sensuelles, douces au toucher… Une sensualité exacerbée par ses teintes allant du brun pâle au brun rouge ocre le plus enivrant. Le violoncelle, c'est l'instrument que l'on remarque d'abord dans un quatuor à cordes. Et quand il est tenu par une Emmanuelle Bertrand, une Ophélie Gaillard ou une Tatiana Vassilieva, alors là, on est en droit d'être troublé.
Tatiana Vassilieva.
Pourtant, l'histoire a surtout retenu de grands violoncellistes masculins : d'Auguste Franchomme à Pieter Wispelwey en passant par Pau Casals, Mtislav Rostropovich, Pierre Fournier, Janos Starker, Anner Bylsma. À ces noms, il faut ajouter celui de la grande Jacqueline du Pré, musicienne anglaise au tempérament de feu que des complications dûes à la sclérose en plaques ont contrainte à une retraite prématurée. Son interprétation du concerto pour violoncelle d'Anton Dvorak sous la direction du flamboyant chef Sergiu Celibidache reste une référence absolue! Écoutez-la!!!!
Aujourd'hui, on peut croire qu'une Emmanuelle Bertrand pourrait bien lui succéder.
Malgré sa popularité contemporaine, il en aura fallu du temps, à cet instrument, pour
prendre sa place parmi au sein du monde musical universel. Disons d'abord que le plus vieux violoncelle répertorié date de 1570, œuvre du luthier Crémonais Andrea Amati (1505 ? – 1577). Nommé « Le
Roi », parce qu’il a été remis au roi de France Charles IX en 1574, il est
encore utilisé aujourd'hui, à l’occasion. J’avais d’ailleurs un disque Accent d’œuvres de
chambre baroques où il sert de continuo, de basse finalement. Faudrait bien que
je le retrouve! Je me souviens juste que l’interprète en était le violiste
Wieland Kuijken, de la célèbre famille de baroqueux flamands. Ce violoncelle et les autres instruments de la famille des violons allaient d'ailleurs faire la renommée de cette ville italienne dans les siècles suivants. Outre les Amati, on y trouvait le clan des Guarneri et des Stradivari… Rien que ça!
Mais il faudra attendre encore une soixantaine d'années avant que les premières pièces solos lui soient consacrées; œuvres de Frescobaldi,
Battista Degli Antonii, Jacchini et surtout, de Domenico Gabrielli, qui tous, firent les belles heures de la musique italienne du 17ième siècle. En fait, dès
qu’on a fileté de métal la corde de basse, l’instrument est devenu tout à coup
beaucoup plus intéressant comme soliste. Aux canzones, canons et ricercates du
début du siècle ont succédé les sonates et concertos qui devaient pulluler au
18ième sous l’impulsion des Leo, Porpora et autres Vivaldi qui lui
donnèrent une réel popularité… sans toutefois atteindre celle de maître violon.
Faut dire qu’entretemps, un certain Jean-Sébastien Bach avait créé six suites
qui allaient devenir l’alpha et l’oméga de l’instrument jusqu’à aujourd’hui.
Peu mis en vedette par les classiques, sauf dans quelques
œuvres de Haydn et de Beethoven, il le sera plus par les romantiques qui
sauront mettre en valeur son chant et ses chaudes sonorités. Brahms,
Mendelssohn, Schubert, Liszt, Chopin, Rachmaninov (violoncelle et piano) et
Dvorak (un immense concerto pour violoncelle) écriront tous des œuvres significatives
et intenses pour l’instrument. Et
l’on ne parle pas de ces courtes pièces si célèbres comme Le Cygne
(Saint-Saëns), le Chant des oiseaux (traditionnel adapté par le grand Pablo
Casals), Après un rêve (Fauré), et autres qui ont drôlement contribué à faire
du violoncelle l’instrument romantique par excellence… qu’il n’est vraiment
pas.
Mstislav Rostropovich au pied du mur de Berlin.
Et le XXe siècle, avec des dizaines d’œuvres puissantes et
exigeantes ne réussira pas à défaire cette réputation. Par contre, quel beau
répertoire nous avons! Il faut au moins nommer ( et écouter!) la monumentale sonate pour
violoncelle seul de Zoltan Kodaly (1915), les trois sonates pour le même
instrument de l’Anglais Benjamin Britten et de Sir Edward Elgar son
magnifique concerto. Les Hongrois Gÿorgy Kurtag et Gÿorgy Ligeti, le Roumain
George Enescu ou le Catalan Gaspar Cassado ont tous écrit des œuvres remarquées
pour l’instrument.
La musique de film s’est également illustrée en mettant de
l’avant le violoncelle, notamment avec le célèbre et merveilleux
« Smile » de Charlie Chaplin. On retrouve le violoncelle aussi dans
le jazz où les contrebassistes l’utilisent à l’occasion, à l’instar de Ray
Brown, George Duvivier, Charles Mingus ou Dave Holland pour n’en nommer que les
plus illustres. Le plus important est cependant le New Yorkais Erik Friedlander
qui, depuis plus d’un quart de siècle, improvise sur l’instrument en solo, avec
son band Prowl, en compagnie des différentes formations Masada de John Zorn. Friedlander
est un merveilleux violoncelliste.
Enfin, au cours des dernières années, la musique populaire l’a
aussi intégré à son répertoire, on n’a qu’à penser aux Québécois Jorane et Claude Lamothe, aux Avett Brothers, Crooked Still et Andrew Bird, à la
Brésilienne Dom La Nena et l’hallucinant groupe de violoncellistes Apocalyptica
qui reprend des tounes de rock métal (de Metallica, entre autres). Bref, on n’a pas fini d’entendre le violoncelle!
Quelques enregistrements remarquables
Anner Bylsma, Le violoncelle au 17e siècle. Deutsche Harmonia Mundi.
Pieter Wispelwey. Jean-sébastien Bach, Suites pour violoncelle. Channel Classics
Andras Schiff/Myklos Perényi. Beethoven, Musique pour piano et violoncelle. ECM
Pierre Fournier. Dvorak, Concerto pour violoncelle. Deutsche Grammophon
Gauthier Capuçon, Gabriela Montero. Rhapsody, Sonates pour violoncelle de Rachmaninov et Prokofiev. Virgin Classics
Jean-Guyhen Queyras. Kodaly, Sonate pour violoncelle seul. Hatmonia Mundi
Erik Friedlander. Prowl. CryptoGramophon
Et pour en savoir plus sur l'histoire et la facture du violoncelle…
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