Mon CKRL, c’est Jacques Parent qui anime la
« Nuit des Rois » dans les années 1970 et me fait découvrir la
fascinante Sonnerie-de-Sainte-Geneviève-du-Mont-à-Paris de Marin Marais,
musicien à la cour de Louis XIV. C’est Léo Ferré en compagnie de François
Desmeules, ex-directeur de la programmation, les « Routes
enchantées » empruntées par Jean Provancher les dimanches après-midi, les mondes folk d'Hubert Tremblay.
C’est aussi Miles Davis, Tom Waits, le contrebassiste Dave Holland, Brigitte
Fontaine et, bien sûr, Richard Desjardins, ma découverte à la station.
Surtout, c’est l’ami de toujours, Martin Bolduc, qui m’a invité à une
nuit du jazz en 1986, en compagnie du batteur Pierre Tanguay. Ce fut mon
initiation à la radio et prélude à une carrière d’animateur bénévole à CKRL.
Martin qui est d’abord mon ami, fut concurremment
animateur, membre du comité de programmation, président du conseil
d’administration de la station. Pendant une décennie, il s’y est investi corps
et âme jusqu’à ce que le travail et l’amour l’amènent à Montréal. C’est avec
lui qu’est né « Rictus », l’émission de musiques d’avant-garde dont
Paul Marois fut un pilier visionnaire, « Par quatre copains » où Denis
Jodoin devait nous rejoindre. C’est grâce à lui, enfin, que j’ai crée, avec
Perron, « La Folia » l’émission de musique ancienne qui, même si elle
a changé de nom et d’animateur, est toujours en ondes le dimanche matin, près
de 30 ans plus tard. Martin en a assuré la mise en ondes quelques semaines, le
temps que nous, pauvres béotiens de la technique, puissions à peu près devenir
autonomes.
L'entrevue
- Bonjour tout le monde! Gilles Chaumel au micro
qui vous souhaite bienvenue à cette émission spéciale de Folk d’Amérique
réalisé dans le cadre du radiothon 2012 de CKRL. Spéciale parce que je suis en
compagnie d’un digne successeur des Woodie Guthrie, Pete Seeger, Bob Dylan et
autres Joan Baez, le poète, auteur compositeur Richard Desjardins!!!
- Ouais, je ne suis pas tout seul, on est une
gang…
Et c’était parti comme ça pour 20 minutes d’entrevue avec ce
géant de la chanson contestataire que j’ai eu le plaisir d’interviewer dans le
cadre du 31e radiothon de la plus vieille station de radio
communautaire de langue française en Amérique. Au programme, l’engagement,
l’amer Indien, L’existoire (disque et concert) et… le pays des calottes. Vous
pouvez d’ailleurs entendre cette entrevue en baladodiffusion
sur la page Web de CKRL-MF.
Ce fut un grand un plaisir pour moi, même si l’estomac me
papillonnait drôlement au début, d’autant plus qu’on a eu droit à quelques
anecdotes savoureuses et rares de la carrière du grand artiste et qu’il s’est
montré totalement gentil et disponible tout le temps qu’il a été avec nous.
L’homme est timide mais néanmoins très conscient de sa valeur, d’où sa boutade
« on est une gang » lorsque je l’ai associé aux grands folksingers du siècle dernier.
Comment en suis-je arrivé à me retrouver devant Richard
Desjardins? Tout simplement lorsque la directrice de la programmation me l’a
demandé :
Richard Desjardins a accepté de venir au
radiothon. Comme tu animes Folk d’Amérique, est-ce que ça te tente de le
recevoir?
- Ben oui, d’autant plus c’est moi qui ai fait
jouer Richard Desjardins pour la première fois sur les ondes de la station.
C’était, avant même la parution de « Tu m’aimes-tu? », la version
vinyl de « Les derniers humains ».
-
Bon, parfait, c’est réglé…
-
Euh, est-ce que je peux y réfléchir un ti peu?
- Oui, mais ne tardes pas. Bon, ok, ça me
stressait, mais j’ai quand même dit oui quelques jours plus tard… en me
demandant dans quoi je m’embarquais…
Mais
bon, faut s’assumer, comme disait Plume Latraverse, pas s’assommer. Et c’est
tout à fait vrai que j’ai été le premier à faire tourner Desjardins, en 1988. À l’époque, l’ami Claude Lépine, qui commençait
dans la distribution de disque, est venu à la maison pour me présenter et
écouter de la musique, activité que nous partagions alors rageusement. Après
avoir écouté des grandes pointures comme le World Saxophone Quartet, en jazz,
ou le violoniste Sigiswald Kuijken en musique baroque, il a sorti un disque (un
vinyl évidemment) avec une pochette noir et blanc avec la tête « du gars
avec des lunettes » et un titre : « Les derniers humains ».
Claude
me dit : « Je ne sais quoi penser de ça. Les textes m’on l’air forts,
mais la voix est… comme bizarre. » Et il avait raison, mais la poésie des
Yankees était si forte, la guitare si intense, que je suis tombé sur le cul…
Deux jours plus tard, à mon émission estivale de l’époque, en soirée. J’ai fait
jouer « Les Yankees »…
Lila Downs
Vous
connaissez sans doute cette extraordinaire chanteuse, Lila Downs, une
sorte de Richard Desjardins mexicano-américaine, qui, tout en défendant à sa
façon les perles de la musique traditionnelle de son pays, demeure une
contestataire virulente qui ne cesse de dénoncer l’oppression faite aux
déshérités qui hantent la frontière à la recherche d’une vie meilleure.
Eh
bien la dame récidive avec un album qui rend hommage aux peintures votives que
l’on trouve à Mexico et qui sont l’expression d’un vœu fait pour des raisons
religieuses. Enfin, peu importe, cet album est magnifique, réalisé dans la
grande tradition de la chanson latino, faite de ballades douloureuses, de
musiques dansantes dont la caractéristique principale est l’intensité de
l’expression. Il y a dans cet album, une des versions les plus puissantes que
je connaisse de « Cucurrucucu
Paloma ».
Beethoven Berg
Pour
la deuxième fois en moins de deux ans, la maison de disque Harmonia Mundi propose
le concerto pour violon de Beethoven avec la violoniste allemande Isabelle
Faust. Pourquoi se tirer dans le pied alors que la première rencontre avait
déjà obtenu les plus grands éloges? Parce que la présente édition avec
l’Orchestre Mozart dirigé par Claudio est tout à fait époustouflante, montrant
une Faust inspirée et visionnaire, et que le disque est complété par le concerto
dit « À la mémoire d’un ange », du dodécaphoniste Alban Berg. Encore
une fois, l’interprétation est des plus magique. Déjà, cet album a obtenu les critiques les plus
élogieuses un peu partout sur la planète…
Un
must évidemment, mais il faut savoir que le concerto de Berg est plus exigeant
à l’écoute. Le compositeur l’a écrit à l’occasion du décès de la jeune Manon
Gropius, 18 ans, la fille d’Alma Mahler et de Walter Gropius de qui il était
très proche (de Manon, pas de Walter!). C’est intense, un chef-d’œuvre, mais
qui ne peut surpasser le plus beau concerto pour violon de tout le répertoire,
celui de Beethoven!!!
Cowboy Junkies
Les
torontois de Cowboy Junkies ont fait paraître quatre disques en deux ans qu’ils
ont intitulé The Nomad Series. Vous
saurez tout sur ce projet en consultant le blogue
Mac et guitare. Je ne les ai pas tous entendu mais le dernier, The Wilderness, qui parle à la fois de
solitude et de quête existentielle dans une atmosphère d’une grande douceur.
Les Junkies comme je les aime!!!!
Mirel Wagner
Une
marginale dont on ne sait rien mais dont Libération
en fait un portrait aussi saisissant que… vide, comme seuls, parfois, les
Français savent le faire. « Ce serait une
Billie Holiday qui se serait trompée de latitude, téléportée du «pot au noir»
des mythologies pirates jusqu’aux rivages de l’antique Thulé avec un ukulélé. »
vous voyez le genre. N’empêche, c’est à lire !
Mirel Wagner est
Finlando Éthiopienne, ne joue quand dans des espaces improbables, souvent
crades, et propose des mélodies quasiment statiques, d’une simplicité
désarmante mais toujours bouleversantes.
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