Vacances en lac
Sept jours et six nuits à naviguer avec carte et GPS pour trouver notre « chemin » à travers les îles, au sein de cette véritable jungle témiscamienne. Ici, le territoire est vierge, uniquement parsemé, ça et là, de quelques installations de pourvoiries. Partout autour de l’eau, une forêt dense où dominent des pins qui reposent sur des blocs de granit à perte de vue. Une forêt si impénétrable qu’on peut à peine s’y « bûcher » un camping pour la nuit sur la pointe d'une île.
Le temps? Toujours beau malgré quelques épisodes de pluie, suivies d’éclosions de moustiques qui, malgré le vent et les fréquents passages nuageux, aimaient se faire harassants. Pendant une semaine donc, le bonheur nous a poursuivis assidument. Ça a continué les jours suivant alors qu’au sortir du lac, Loulou et moi prenions le chemin de l’Abitibi et que Sylvie retournait à Montréal.
Le pèlerinage
L’Abitibi, c’est le pays de ma douce. Elle est née, comme vous le savez sans doute, à Noranda, à deux pas de chez Richard Desjardins. Nous nous y sommes arrêtés pour prendre des photos de la maison paternelle, de celle de la grand-mère et de la tante XXX. On a retrouvé l’école, le centre-ville, délabré maintenant que les centres commerciaux ont poussé en banlieue. On a vu lac Osisko, sur lequel Léo, le père de Loulou, avait sa flotte d’hydravions de brousse. C’est cet endroit qui l’a ému le plus, ma douce.
« C’est ici que mon père avait sa compagnie d’avions, la Gold Belt. On partageait la même passion pour la liberté qu’offre le vol, le ciel à perte de vue. Il ne parlait pas beaucoup mon père, mais dans ces moments-là, on était très près l’un de l’autre. C’est sans doute à cause de lui que j’ai voulu devenir pilote. Quand j’ai dû abandonner à cause de mes yeux, ça a été un deuil difficile. »
C’est sans doute pourquoi Loulou a choisi d’accompagner jusqu’à son dernier souffle un Léo que le cancer avait frappé, vivant avec lui, dans sa chambre, ses dernières semaines...
Juste avant d’arriver à Noranda, nous avons cherché et trouvé le chalet familial, sur les bords du petit lac Olier, à quelque 25 kilomètres de la ville. Plus tard, arrivé au lac Tiblemont, au chalet de Louise et Michel, les amis de Loulou, nous avons raconté notre périple. Ce fut le prélude à une soirée merveilleuse, la plus belle de nos vacances en ce qui me concerne. Sur fond de musiques folks de toute l’Amérique, de bon vin et de viande d’orignal, nous avons été reçus par deux personnes tellement généreuses! J’y ai entendu des histoires qu’on n’entend pas en ville, des histoires d’ours, d’avions et d’hélicos écrasés, de prospection minière, de liens indéfectibles entre les gens, de nature avec un grand N.
Même chose le lendemain chez Sylvie et Roch et le surlendemain, dans les Laurentides, chez Diane, la sœur de Loulou et son chum Michel-Pierre. Quel festin là aussi et quelle belle soirée à parler des petits-enfants, de cuisine et de marchés publics (c’est la grande passion de Diane) et d’écriture (celle de Michel-Pierre. Enfin, on s’est retrouvé à Montréal chez Sophie, la cadette de Loulou, Pierre son chum et leur fils Loïk, un an. Encore une fois, un beau moment. Vraiment, de grandes vacances!
Dieu en camping
Commençons par la mer; aux environs des Grandes Bergeronnes, comme toujours en ce qui nous concerne. C’était la semaine dernière et Dieu, notre petit-fils Gédéon, nous accompagnait. Loulou s’était promis de l’amener en « pangking » comme il dit, au moins une fois durant l’été. Je pense que je ne l’ai jamais vu aussi enthousiaste que durant ces deux jours. Le sourire perpétuellement aux lèvres, heureux comme un roi face à la mer du Camping Bon-Désir, il était toujours aux premières loges pour nous aider à monter les tentes, planter les piquets, préparer les repas. Et il le faisait avec une sorte de lumière vive dans les yeux, fébrile en diable, soutenu avec un amour infaillible, par sa grand-mère de Loulou qui l’a promené dans tous les racoins du camping, sur la plage, en zodiac pour aller voir les baleines, et dans sa tente pour le dodo. Infatigable la mamie. Et combien heureuse de concourir au bonheur de son petit-fils adoré.
J’ai bien apporté une contribution à un moment ou l’autre, mais l’osmose entre Loulou et Ged était totale. Alors, après le coucher du soleil, j’ai fait une sortie de nuit en kayak de mer avec les guides de Mer et Monde Écotours, Claudie Pascale et Marc-Antoine. Quelle sortie! Ciel nuageux, nuit sombre et vent sans conséquence. On sort comme des aveugles sur la mer, les seuls lumières visible étant les petites lampes au phosphore que chacun arbore au dos de sa veste de sécurité. Seule lumière??? Oh que non, parce que dans ces circonstances, le phénomène la bioluminescence est à son comble quand on navigue. Les kayaks fendent l’eau laissant une trainée d’étoiles lumineuses vive à la surface de l’eau, idem pour le mouvement des pagaies.
C’est toujours un peu beaucoup magique, même quand ce n’est pas la première fois. Mais c’est devenu totalement fantastique quand nous nous sommes retrouvés au cœur de la zone de nourriture de trois petits rorquals (qui font quand même 8 mètres et pèsent 10 tonnes) qui s’alimentaient en surface. Il devait y avoir tant de plancton qu’ils ne cessaient de sauter à répétition hors de l’eau. Comment les voyait-on au cœur de la nuit sombre? Mais par la bioluminescence pardi! On ne voyait que leur forme lumineuse s’ébattre, comme dans un dessin animé à la Walt Disney. Et surtout parce qu’ils étaient incroyablement proches de nos bateaux. En fait, c’est nous qui étions proches. À un moment donné, un rorqual a sauté juste en avant de nous, un autre sur le côté et un autre en arrière, arrachant des exclamations inquiètes des kayakistes.
Pendant ce temps, les guides expliquaient de long en large ce qui se passait, que le phytoplancton et le zooplancton dérive au gré des courants et comme nous ne pagayions pas, nous dérivions avec, d’où notre présence dans le garde-manger des rorquals. Ce n’est que le lendemain matin que Claudie et Marc-Antoine m’ont avoué avoir été inquiets face à ces cétacés bien trop près à leur goût et sans doute un peu énervés (les cétacés, pas les guides qui sont d’un calme olympien). « Heureusement, qu’on était tous regroupés », ont-ils conclu. Ah bon, moi j’ai trouvé ça cool, trois belles heures de kayak en mer de nuit.
Le sixième petit-filsIl s’appelle Lionel, du nom du père de Loulou. C’est le sixième petit-fils de ma douce et le troisième fils de Rosemarie et de Christian. Lion, est donc de frère de Dieu (Gédéon) et de Florent. La sainte trinité, quoi!
Il est né le 6 juillet, quelques jours après un déménagement épique dont je vous épargne les détails, mais qui nous aura permis, à Loulou et à moi, de vivre de très près avec Flo et Ged que nous avons gardé presque toute une semaine. Des anges que mon fils Nicolas a enjôlés, au cours d’un après-midi pluvieux, en leur donnant un fort joli concert de guitare. Les petits étaient fascinés et le papa, tellement fier de son garçon musicien.
Musique et livres
Pas besoin de vous dire que les longues heures en auto se sont déroulées (hi, hi) sur fond musical. De la musique de char en masse : Richard Séguin, Mary Gauthier, Bruce Springsteen, Bob Dylan, Bob Marley, Martin Léon, l’inévitable Richard Desjardins, Steve Earle nous ont accompagné tout au long des 2 355 km de notre périple. Mais mon préféré fut sans contredit le splendide Bright Mississipi d’Allen Toussaint, jazz d’inspiration néo-orléanaise revisité avec une subtilité inouïe.
C’était avant que le trop confidentiel Joe Henry ne sorte Blood from Stars, un disque majeur de 2009. Qu’est-ce? Je pense qu’on peut classer cet inclassable dans la catégorie folk, mais un folk fortement coloré de jazz (c’est le même Henry qui a produit l’album d’Allen Toussaint cité plus haut). C’est plein de piano, de saxo, de guitares et de basses aussi électriques qu’acoustiques. Ça raconte des histoires sur un fond musical riche, recherché, où les mélodies demeurent simples avec, parfois, comme un goût de mystère. On a l’impression de vivre l’atmosphère d’un polar… disque Nonesuch!
En fait, cette musique se marie, se fond dans l’univers de ce remarquable écrivain Louisianais qu’est James Lee Burke, dont les polars transpirent les odeurs et les couleurs du Sud, sa violence et sa musique aussi. C’est ma lecture de l’été. Déjà j’ai lu Le boogie des rêves perdus et Joli Blon’s Bounce. Actuellement, je suis enfoncé jusqu’aux yeux Dans la brume électrique avec les morts confédérés et sur ma table de chevet attend Black Cherry Blues. C’est full blues et tout bon. Éditions Rivages/Noir.
Bonne semaine!!
Bonne semaine!!
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