Le Chat est couché devant le poêle à bois brûlant. Quand je viens m’asseoir avec ma douce sur le fauteuil, il s’étire, s’allonge (ça, c’est une exploit considérant son tour de taille), se tourne et retourne deux ou trois fois sur lui-même, ronronne, jappe, miaule puis s’amadoue, m’amadoue, amadoue Loulou pour solliciter le droit de venir se faufiler entre nous, s’installer, se coller et enfin se détendre totalement, heureux et repu comme un couple après l’orgasme.
Remarquez que ma blonde et moi, on se sent un peu comme lui. La semaine a été fort bien remplie, même si on l’a coupé en deux en prenant le mercredi de congé comme semaine de relâche. Grand bien nous fit puisque ce fut là sans aucun doute la plus belle journée de ski de fond de l’hiver. Le mercure légèrement sous zéro, un ciel du bleu le plus pur, une neige neuve qui a chargé les arbres de sa blancheur éclatante, la nature s’était mise sur son trente-six.
La journée « orignal »
En plus, jamais la glisse n’aura été aussi bonne qu’en cette journée. Un fartage soigné nous a permis de littéralement voler sur les pistes. Sauf sur la neuf, tout près de la rivière Huron, où je me suis arrêté pour regarder à mon tour ce qu’observaient des skieurs déjà arrêtés. Un beau buck, superbe orignal mâle qui, après avoir bu, remontait la montagne pour se perdre enfin à travers les arbres.
Plus haut, dans la quinze, retour de la bête dont je n’ai vu que la trace fraîche que des skieuses excitées m’ont décrite avec force détails. Pis la longue montée de la vingt, et le tour du lac Turgeon pour redescendre sur une dizaine de kilomètres jusqu’à l’accueil du Refuge. Loulou, qui venait tout juste d’arriver, m’annonce qu’elle a parcouru vingt kilomètres le temps de le dire. Elle était fière… avec raison.
En retournant à la maison, c’est Loulou qui conduisait quand une femelle orignal un peu paniquée est sortie d’entre deux maisons pour s’arrêter au beau milieu de la rue Saint-Edmond, à quelques mètres de nous. On s’est arrêté aussi, forcément, pis vite à part ça. On était tous trois totalement ahuris, mais je pense que l’orignale l’était encore plus que nous. Elle a traversé complètement la rue pour emprunter avec difficulté le champ qui mène à la forêt loin à l’ouest. La neige épaisse s’enfonçait sous son poids rendant sa progression pénible. Elle faisait vraiment pitié à voir, ayant un long chemin à parcourir avant d’atteindre le couvert des arbres. Mais nous ne sommes pas restés pour voir la suite… Il semble qu’à ce temps-ci de l’année, les femelles se cherchent un coin pour mettre bas alors que les mâles cherchent à les regrouper pour maintenir le ravage. D’où l’intense circulation de la vingtaine de bêtes que l’on trouve dans les montagnes de Saint-Adolphe.
Pluie et coocooning
Et voilà qu’en ce beau dimanche, on a remis ça (le ski, bien sur), mais dans des conditions tout autres. Si le soleil était de la partie en matinée, la pluie s’est mise à tomber dès qu’on eut chaussé nos skis. Piste glacée, fartage rapidement disparu arraché de la semelle par la neige abrasive, nous avons fait de peine et de misère seize kilomètres sous la flotte de plus en plus intense. Mais on y tenait, la forme était là, le plaisir aussi malgré tout. C’est pourquoi, de retour à la maison, nous avons poursuivi dans la même veine en prenant en commun une douche bien chaude, conclue par une douce séance de fauteuil en face du poêle à bois. On était trois à ronronner éperdument.
Mais ça n’allait pas s’arrêter sur un si bel élan. Non, non, il n’est plus question ici d’orignal, oubliez ça, mais plutôt sur un plat de crevettes sautées au cari rouge avec plein de légumes aromatisés au gingembre et au lait de coco. Arrosé d’un petit Saumur blanc de 2003, ce fut absolument succulent et… très piquant.
Et pour couronner le tout, vers la fin de l’après-midi, j’ai eu une longue conversation avec mon Montréalais de fils, Jean-Philippe, qui m’a fait parvenir par courriel la jaquette de son prochain disque, Omniprésence. Je ne vais pas vous la décrire en détail, mais disons qu’elle annonce remarquablement le contenu qui dénonce fascisme et racisme et qui exhorte à liberté par la prise en main de soi-même. Comme quoi le rap ne dérape pas toujours. Mon grand m’a aussi appris que sa directrice le mettait en nomination comme stagiaire de l’année dans le réseau des centres jeunesse du grand Montréal et qu’il avait une job en intervention psychosociale pour l’été… à tout le moins. Pâpa est très, très fier! Y a pas à dire, l’écoute et la communication, y a rien de mieux.
Bonne semaine tout le monde…
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