jeudi 22 mars 2012

Un dimanche de mars à la campagne


Du kayak dimanche, à Neuville, sur un fleuve étale où ne subsistaient que quelques blocs de glace épars sous le soleil. Partout, sur l’eau et dans les airs, des bernaches hantent les lieux dans un piaillement incessant. En cette fin de journée, tout concourt à l’harmonie et à une sorte d’euphorie qui me gagne lentement malgré le départ de ma douce pour Iqaluit, au Nunavut. Ma Loulou sera partie toute la semaine durant et, après un court week-end, elle s’envolera de nouveau vers la Baie-James pour 10 jours. Heureusement, le bonheur a caressé notre dernière journée. Maëllie et ses parents sont venus déjeuner avec nous.

Il était 10h, la brume venait à peine de se lever quand ils sont arrivés, mon fils Jean-Philippe, sa belle Marie-Pier et Maëllie, ma petite-fille si gentille, celle qui a inventé la bonne humeur et le plaisir de vous voir. Et elle était en pleine forme, la Maëllie. Ça faisait à peine deux minutes qu’elle était entrée que déjà elle courait partout, riant piaillant, au grand déplaisir du chat Max qui, jaloux comme un pou, ne cessait de sauter autour de la petite, faisant mine de vouloir la chasser.

« - Bon, c’est les menaces, Max, allez au sous-sol pendant que nous, on déjeune! » Il ne s’est objecté, le noiraud, il adore cette cave, lieu de toutes ses découvertes…




Des crêpes aux pommes et au sirop d’érable, qu’elle a préparé, ma douce. Il y en a des tas! Et aussi des croissants et des chocolatines, des confitures et des fruits que Maëllie mange sans fin, le sourire aux lèvres et le jus au menton. Ça sent bon le bien-être et le plaisir d’être ensemble. Pour digérer le tout, on sort au soleil et on travers la 138 pour se mettre les pieds dans la neige, juste au bord du fleuve. C’est à ce moment que germe en moi l’idée de sortir en kayak.


La veillée des veillées

Mais pour l’instant, nous profitons du plaisir d’être ensemble. Je raconte alors ma soirée de la veille où je suis allé voir et entendre mon fils cadet Nicolas donner son spectacle annuel de la Saint-Patrick au Bal-du-Lézard, à Limoilou. Encore une fois en compagnie de ses amis, Audrey (voix et flûtes), Stéphane (accordéon), Alex (batterie) et Fred (voix), Nico y est allé de sa plus belle énergie à nous pousser les plus beaux airs trad irlandais. Voix puissante, guitare au diapason, le fils en a envoûté plus d’un dans une salle bondée qui ne demandait qu’à taper du pied.

L’apothéose est survenue lorsque la chorale de Limoilou est venue s’entasser sur scène et que Fred et Nico ont enchainé, tour de rôle, les chansons les plus syncopées et énergiques de leur répertoire, appuyés par les sept ou huit voix et les 14 ou 16 pieds du chœur. Le délire dans la salle que la belle Audrey avait réchauffée tout au long du concert en rappelant à tous qu’il était tout à fait permis de se saouler à la Saint-Patrick!!!

Loulou au Nord!
Après une séance de photos dans la neige avec Maëllie en vedette, la famille est repartie et Loulou a terminé ses bagages. Une semaine à des températures oscillant entre -16 et -40 demande une certaine logistique… et un courage certain en ce qui me concerne. Même qu’aux heures libres que lui laissera le congrès sur le tourisme nordique, ma douce a l’ intention d’aller courir!

« - Dehors? », que je lui demande incrédule.
« - On verra, » qu’elle me répond.

C’était tout. Lorsqu’elle m’a appelé, ce lundi après-midi, il faisait au moins – 40 et la petite marche qu’elle avait faite dans la ville l’avait laissé totalement transie.

« - Finalement, je vais aller dans le gymnase, » a-t-elle conclue, débonnaire.

J’ai hâte de voir comment se passera le reste de la semaine. Surtout qu’elle est là en pays de connaissance, elle, qui dans sa jeunesse y a vécu quelque cinq ans et en est revenu avec sa Rosemarie nouvellement née… Émotions en perspectives.

Pendant ce temps, outre quelques reportages que je vais pour le compte du ministère du Tourisme comme journaliste pigiste, je vais au concert. Celui d’hier soir, qui amenait sur la scène du Grand Théâtre de Québec, un des plus grands poètes du piano classique, Murray Perahia, fut des plus transcendants. Au programme, Bach, Beethoven, Brahms, Schubert et Chopin, la quintessence du piano romantique (sauf Bach, ben sûr) joués avec une délicatesse que les jeunes excités de la performance de la nouvelle génération ont totalement occultée. Il y avait du divin dans cette célébration, foi d’athée!

De retour à la maison, vers les 11h, je suis sorti de l’auto au cœur d’une brume épaisse qui ne permettait pas de voir à plus de 100 mètres. Mais c’était une brume vivante, pleine des bruits de la nuit. Aux cris multiples et ahurissants des bernaches inquiètes d’une telle gangue nuageuse, répondaient le croassement du corbeau et le chant flûté du merle, étonnés qu’on ne les laisse pas dormir à cette heure indue. C’était un peu  beaucoup magique comme univers, et plus je m’approchais du fleuve plus le bruit devenait assourdissant. Faut dire que cet animal de bernache n’émet pas moins de 13 cris différents pour communiquer avec ses semblables. En cela, il est le plus loquace des animaux… avec l’humain.

Après les sonates de Perahia, j’ai eu droit à la symphonie des oiseaux. Quelle soirée!!

Musique
Je suis tout à fait sous le charme de deux albums que je viens de découvrir, des albums de musiques douces et tellement rares. Pas rare au point qu’on ne les connaisse pas mais rares au point de ne jamais avoir entendues ces musiques interprétées avec autant de délicatesse et de pureté.

Le premier s’appelle « If Grief Could Wait » et propose des musiques d’Henry Purcell et du 17e siècle anglais. Mais attention, on trouve aussi dans ce programme des chansons de Leonard Cohen et de Nick Drake. Les chansons, qu’elles soient anciennes ou modernes, sont interprétées par une Susanna Wallumrod (avec une barre sur le o qui trahit son orignie norvégienne) à la voix pure comme du cristal, une chanteuse « pop » (si pas pop, pas classique en tout cas, pas soprano, ni rien de ça). Une voix aussi naturelle que possible.

Elle est accompagnée de la harpe baroque d’une remarquable musicienne suisse qui s’appelle Giovanna Pessi. C’est elle qui signe tous les arrangements qui nous mettant aussi en vedette une viole de gambe et une nickelharpe ancienne. Entendre « Who By Fire » de Cohen dans cet esprit est tout à fait saisissant, tout autant que de découvrir le célèbre et touchant « Music for a While » de Purcell chanté avec autant de simplicité, voire d’indolence. Tout, dans cet album, absolument tout est d’une ineffable délicatesse. (Disque ECM à la sonorité remarquable).



Le second disque met en vedette une harpe moderne, ou plutôt un musicien  d’une incroyable expressivité, Xavier De Maistre. L’album, initulé très justement « Nuits d’étoiles » prpose un récital de musique de Monsieur Croche, Claude Debussy, dont la musique pour piano se prêtre drôlement bien à la transcription pour harpe. On reste dans le même univers impressionniste avec une aura de magie et de délicatesse décuplées. De Maistre, qui accompagnait la soprano Diana Damrau lors de son passage au Club musical de Québec, avait fait si grande impression sur les auditeurs que mon ami Denis (Sillons le disquaire), qui vendait des disques dans le foyer, s’est fait solliciter pour des albums du jeune homme plus que de la vedette…

Bref, si l’onirisme vous sied, lancez-vous. C’est d’une splendeur!!  

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